Les candidats politiques qui se présentent aux élections sont tributaires de l’électorat, de la notoriété et de la popularité. Dès lors, ils se servent parfois, à l’approche d’élections, de données à caractère personnel des citoyens pour leur adresser des messages personnalisés censés les inciter à voter en leur faveur lors d’une prochaine élection.
Au sens du RGPD, de telles actions à des fins électorales relèvent de la notion de marketing direct ou prospection. Ceci a pour conséquence qu’un traitement qui est nécessaire aux fins des intérêts légitimes d’un parti politique ou d’un candidat est a priori licite, à condition que les intérêts ou les droits et libertés de la personne concernée ne prévalent pas. Il s’agira donc d’être particulièrement attentif à la nature des données à caractère personnel utilisées, à la finalité et au fait que la personne concernée peut raisonnablement s’attendre à ce type de message.
En revanche le traitement de données sensibles (Art. 9 et 10 du RGPD) reste interdit. C’est le cas, par exemple, lorsque des candidats effectuent des recherches au sein des listes d’électeurs (ou des listes de registres de population) afin d’identifier les membres d’une communauté immigrée à laquelle il souhaite adresser de la propagande personnalisée.
Deux sources sont possibles pour obtenir les données des citoyens
Les données viennent des listes d’électeurs ou des listes du registre de population
Les listes des électeurs constituent une source de données à laquelle les partis politiques et les candidats peuvent en principe légitimement avoir recours à des fins de propagande politique afin de briguer les suffrages. Les données figurant sur ces listes peuvent exclusivement être utilisées à des fins électorales durant les six mois précédant la date d’une élection ordinaire (durant les quarante jours précédant la date d’une élection extraordinaire). En effet les administrations communales doivent fournir des exemplaires ou copies des listes des électeurs aux personnes agissant au nom des partis politiques. Lors de la délivrance des listes d’électeurs, la commune vérifie que leur destinataire se présente effectivement à l’élection. Les personnes ayant reçu des exemplaires ou copies de liste ne peuvent pas les communiquer à des tiers et ne peuvent être utilisées qu’à des fins électorales.
Le destinataire de la liste (en format papier ou électronique) devra alors signer une déclaration attestant qu’il a pris connaissance des interdictions édictées par la loi et qu’il s’engage à respecter la loi. Les exemplaires ou copies de la liste des électeurs peuvent être utilisées à des fins électorales, « y compris en dehors de la période se situant entre la date de délivrance de la liste et la date de l’élection », ce qui implique manifestement que les personnes qui ont reçu ces listes licitement avant les élections peuvent encore les utiliser après ces élections, certes uniquement à des fins électorales.
Les données viennent d’autres sources que le registre de population
Les partis politiques et les candidats peuvent être tentés d’utiliser des données à caractère personnel recueillies dans le cadre d’autres traitements dont la finalité première n’avait rien à voir avec la propagande électorale.
Cela vaut pour des données extraites de fichiers du secteur public comme le Registre National, des données de fichiers du personnel, une liste des personnes aidées par un CPAS, des données obtenues dans le cadre de l’exercice d’un mandat d’échevin,… le traitement ultérieur de ces données pour d’autres finalités n’est autorisé que si le traitement ultérieur est compatible avec les finalités pour lesquelles les données ont été collectées initialement. Une finalité compatible est par exemple une finalité que la personne concernée ici le citoyen peut prévoir ou qui peut être considéré comme compatible en vertu d’une disposition légale.
Par défaut, il n’est donc pas permis de réutiliser les données à caractère personnel enregistrées dans les fichiers précités dans un but de propagande électorale. Un tel traitement est incompatible avec les finalités pour lesquelles ces données ont été initialement récoltée. Les partis politiques et les candidats violent également le principe de finalité lorsqu’ils ont recours à une « source publique » pour recueillir des données à caractère personnel et les utiliser ensuite à des fins publicitaires. Il s’agit par exemple de faire-part de naissance ou de mariage, de forum de discussion sur Internet, etc. À titre d’exemple, les données à caractère personnel de citoyens qui ont été obtenues dans le cadre de l’exercice d’un mandat échevinal ne peuvent pas être réutilisées pour l’organisation d’une campagne électorale. Il s’agit alors d’un usage abusif d’informations obtenues de manière licite dans le cadre de l’exercice d’un mandat échevinal.
Toutefois, lorsque la personne concernée a donné son consentement ou lorsque le traitement se base sur une disposition légale qui constitue une mesure nécessaire et proportionnelle dans une société démocratique notamment pour la garantie de finalités importantes d’intérêt public, le responsable du traitement a quand même la possibilité de traiter ultérieurement les données à caractère personnel pour d’autres finalités, que ce soit compatible ou non avec les finalités initiales.
Quoi qu’il en soit, il faut veiller à ce que la personne concernée soit informée de telles autres finalités et de ses droits (voir plus loin).
Les droits des personnes
Au plus tard au moment de la première communication avec la personne concernée un rappel des droits doit être explicitement porté à l’attention et présenter clairement et séparément de toute autre information.
Le parti politique ou le candidat briguant un mandat est tenu de fournir certaines informations s’il collecte des données à caractère personnel auprès de cette dernière ou via une autre source, ceci en dehors de la liste des électeurs. La personne concernée doit en effet savoir, en toute transparence, que ses données à caractère personnel sont ou seront traitées, par qui, pour quelles raisons, sur la base de quel fondement légal , (…) ainsi que des informations relatives à ses droits (par ex. le droit de retirer un consentement accordé précédemment, le droit d’opposition en matière de prospection, …
Moyens de communication
Du fait de l’évolution des technologies, la tentation existe pour les acteurs politiques d’avoir recours, pour toucher les électeurs, à des moyens de contact aussi directs que l’envoi de SMS ou de courriels pendant leur campagne. L’envoi de messages électroniques étant particulièrement intrusif, les intérêts ou les libertés et droits fondamentaux du citoyen pèsent plus lourd dans la balance que les intérêts légitimes du responsable du traitement. L’envoi de messages électroniques n’est donc admissible que si la personne concernée a donné au préalable son consentement (système « opt-in ») en vue d’un tel traitement de ses données à caractère personnel (articles 6.1, a et 7 du RGPD) ou s’il existe une relation préalable entre le parti politique et le citoyen.
E&V Partners
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Voici un résumé de nos recommandations pour cette période électorale.
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